Si j'étais né en 17 à Leidenstadt
Cette chanson m'a toujours mis les poils. Aux derniers mots prononcés, je pose toujours la main sur le coeur.
"Et qu'on nous épargne à toi et moi si possible très longtemps,
D'avoir à choisir un camp"
Et qu'on nous épargne à toi et moi si possible très longtemps d'avoir à choisir un camp ... (Si j'avais une religion, Jean-Jacques serait mon messie)
La chanson est parfaite pour illustrer cet article "apprendre sur soi et sur les autres en période de tourmente".
Je n'aborderais pas le sujet qui brûle depuis quelques semaines la France. Chacun se fera un idée selon son vécu et ses valeurs. Il n'y a jamais une seule vérité. Evidemment, j'ai la mienne.
Ce qui m’intéresse dans cet article, c'est de voir comment ces moments complexes nous poussent à se décortiquer soi-même pour découvrir qui nous sommes.
Lorsqu'il se passe un événement d'une telle ampleur, il nous sort d'une routine dans laquelle on se connait très bien. Il met en lumière des aspects de notre caractère que jusqu'ici nous ignorions. Un des tiroirs que l'on avait jamais eu besoin d'ouvrir.
Et c'est parfois déconcertant.
L'autre jour, un commentaire sur facebook m'a littéralement embrasée et ma réponse a certainement blessé la personne qui l'a reçu. J'ai ressenti en moi un niveau d'agressivité que j'avais rarement atteint. J'étais en feu, j'étais un geyser prêt à exploser, j'étais ... colère. Au point d'oublier les règles de savoir-vivre et savoir-être.
J'étais la première surprise de mon attitude. Honnêtement, je m'imaginais en une sorte de Carrie White ensanglantée ouvrant les bras pour tout péter.
[Autant te dire que je ne suis pas fière de moi ...]
Si j'ai raison l'autre n'a pas forcément tord. Plus facile à dire qu'à entendre, n'est-ce pas ?
J'y ai réfléchi toute la journée, pendant que je cousais (la couture est un formidable outil de méditation ou de réflexion, au passage, comme le tricot).
Je me suis demandée jusqu'où j'aurai été capable d'aller pour défendre mon point de vue (avec ou sans pouvoirs surnaturels). Je me suis demandée si sur un sujet moins brûlant ma réaction aurait été autrement bienveillante. Ou encore, en quoi tout ça faisait écho en moi ou en mes valeurs.
Mon "moi habituel" défend la discussion et le pacifisme ; sur les réseaux je partage des trucs choupinous ou drôles pour semer des dosettes d'amour et je parle avec un certain calme.
Pour quelles raisons j'avais soudainement le démon ? Pourquoi je me sentais incapable d'être attentive à la vérité des autres si elles ne correspondaient pas à la mienne ?
Ces occasions qui nous permettent de briser la vitre
Je suis une casseuse. J'ai cassé ma propre vitre. Et j'ai envie de voir ce qui se cache derrière.
Dernièrement, elle se fissurait. Moi qui pensais avoir le courage de mes opinions, je me retrouvais face à des contradictions et des peurs.
Qu'allaient penser les autres si ... ? Comment serais-je perçue dans mon quartier, dans ma ville ? Est-ce que je pouvais me faire agresser pour défendre mes opinions ?
La peur, l'inconfort et le doute sont venus me déboussoler. J'étais honteuse de les éprouver, ils ne ressemblaient pas à l'idée que je me faisais de moi.
Puis le ton est monté et je ne me suis plus reconnue (Carry, sort de ce corps). C'est là que je me suis dit qu'il serait intéressant de comprendre ce qu'il se passait en moi et d'analyser la situation.
Qu'est-ce que tout ça m'apprenait ?
- Que j'étais intransigeante
- Que mon goût de la justice était très haut dans l'échelle de mes besoins, avant le mien
- Que j'étais peureuse (je le savais déjà mais j'en avais la preuve irréfutable)
- Que dans une situation de crise je perdais ma capacité d'écoute de l'autre si elle ne correspondait pas à ma vérité
- Que je ne cherchais plus les solutions en me concentrant sur ma colère
Je me suis demandée à quelles autres occasions j'avais été surprise de mon comportement. Le deuil d'un proche ? La tromperie d'un ex copain ? La déception d'une amitié ? Une séparation ?
Bref, toutes ces choses si soudaines qui vous tirent du "personnage" habituel. On parle souvent de sortir de sa zone de confort pour mieux se connaitre, mais on oublie de parler de ces moments où l'on n'a pas choisi le dérapage hors du cadre.
J'avais deux choix : tourner en rond ou m'enrichir de ces découvertes.
Nous sommes des plantes (dit comme ça, ça ne prête pas à l'envie), des plantes qui fleurissent encore de temps en temps. Des bourgeons ont émergé. Voyons quelles fleurs ils donneront, quels fruits vont en sortir.
Pour travailler sur les émotions, je me suis souvenue des 5 phases théoriques d'un deuil :
- Le déni
- La colère
- Le marchandage
- La dépression
- L'acceptation
J'ai remarqué que je passe facilement de la colère à la dépression, ou plutôt à l'abattement. Et que mon style de marchandage devient une démarche pour convertir à ma pensée. Je suis donc une dictatrice à ma façon :)
Ok. J'apprends.
Cela ne fait pas de moi quelqu'un de meilleur, mais quelqu'un capable de s'améliorer.
Chaque situation extraordinaire qui bouleverse nos certitudes est donc une occasion de mieux nous connaitre.
Nos réactions peuvent-être plus réfléchies, moins épidermiques. Ce n'est pas ce qui nous transformera en une armée de petits Bouddha mais ça peut contribuer à apaiser pas mal d'émotions chez les empathiques.
Comme dirait le docteur Nathan Katowski, de ma série préférée This is Us :
"La vie se résume à prendre les citrons les plus amers et à en faire quelque chose qui ressemble à de la limonade"
Et nous sommes nos propres citrons.
Belle journée !